24 avril 1884 | L’Empire allemand proclame la souveraineté sur le Lüderitz-land, l’actuelle Namibie

Même s’il y eut bien quelques implantations de colonies de peuplement allemandes au XVIIe siècle, notamment en Afrique, la véritable naissance de l’Empire colonial allemand se situe après l’unification de 1871. Elle fut avant tout le fruit d’initiatives privées qui reçurent l’appui officiel du chancelier Otto von Bismarck. Aussitôt après la victoire sur la France en 1871, quelques journaux réclamèrent l’annexion de certaines colonies françaises, mais Bismarck jugea alors prématuré de se lancer dans une politique coloniale qui eût éveillé la méfiance du Royaume-Uni. L’Empire naissant – qui manquait d’ailleurs des moyens navals nécessaires à une telle entreprise – avait besoin de se renforcer et de se consolider à l’intérieur avant de se jeter dans l’aventure outre-mer. Ce n’est donc qu’après la création de la Kaiserliche Marine que l’Empire allemand amorça véritablement une politique coloniale d’État, arrivant par ailleurs tardivement sur le « marché » colonial — l’Afrique étant déjà pratiquement partagée entre Français et Britanniques.

Zentralbild
Otto, Fürst von Bismarck-Schönhausen,
preußisch-deutscher Staatsmann
geb.: 1.4.1815 in Schönhausen,
gest.: 30.7.1898 in Friedrichsruh
Cependant, dès 1878 furent créés le Zentralverein für Handelsgeographie und Förderung deutscher Interessen im Auslande(Association (/société) centrale pour la géopolitique commerciale et l’essor des intérêts allemands à l’étranger) à Berlin et leWestdeutscher Verein fur Kolonisation und Export (Association (/société) ouest-allemande pour la colonisation et l’exportation) àDüsseldorf. Ces groupements lobbyistes s’occupaient de questions économiques et de l’émigration. En 1882, le Reichstag repoussa cependant un premier projet de loi devant apporter une garantie étatique pour une Société d’exploitation des Samoas. Ce vote négatif provoqua une vive réaction dans le petit monde des chantres du colonialisme et le 6 décembre 1882, le prince Hermann zu Hohenlohe-Langenburg fonda l’ Union coloniale allemande (Deutscher Kolonialverein), groupe d’intérêts remettant en question l’organisation du commerce des denrées coloniales et les frais d’intermédiaires et droits douaniers exorbitants qui grevaient celui-ci, par ailleurs presque exclusivement entre les mains de monopoles britanniques et français.
Politique coloniale de Bismarck : « Le marchand doit précéder le soldat. »
Cet aphorisme du chancelier allemand résume parfaitement la ligne de sa politique coloniale des années 1880-1890, peu soucieux qu’il se montrait d’engager les finances impériales dans cette aventure, de heurter l’opinion publique allemande peu intéressée par la chose et de s’attirer l’inimitié du Royaume-Uni et de la France, assoiffée de revanche après la défaite de 1871.
Dans une première phase, l’Empire se limita donc à accorder un protectorat sur les possessions des sociétés coloniales allemandes constituées exclusivement de capitaux privés. Le 24 avril 1884, le premier protectorat d’Empire fut ainsi accordé aux possessions de l’homme d’affaires Luderitz dans le Sud-Ouest Africain. La même année, il fut étendu aux possessions deNouvelle-Guinée et de l’archipel Bismarck, du Cameroun et du Togo. L’extension de cette mesure à ce dernier donna lieu à une première friction avec le Royaume-Uni qu’un traité régla à l’amiable l’année suivante.

Prisonniers de guerre hereros en 1904
Cette stratégie politique plaçait de fait les consortiums coloniaux allemands sous la tutelle impériale tout en leur laissant leur autonomie administrative et surtout financière, sous la réserve du droit que l’Empereur conservait de modifier leur statut. Le chancelier affirma clairement que « (son) intention, conforme à celle de Sa Majesté, est de laisser à l’activité et à l’esprit d’entreprise de nos concitoyens, navigateurs et commerçants, la responsabilité entière de la fondation et du développement matériel de la colonie. Je ne me servirai pas de la forme de l’annexion de provinces maritimes à l’empire allemand, mais je délivrerai des lettres de franchise semblables aux Royal Charters anglaises. »
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