13 février 1960 | Gerboise bleue: Essai nucléaire souterrain de la France dans le désert d’Algérie.

Gerboise bleue est un essai nucléaire destiné à tester la première arme nucléaire de la France. Il a été effectué le 13 février 1960 à 7 h 4 (heure locale) dans la région de Reggane, alors département français du Sahara, durant la guerre d’Algérie.

Cette opération s’inscrivait dans le cadre de la politique de dissuasion nucléaire voulue par le général De Gaulle.

Son nom de code fait référence à la gerboise, un petit rongeur des steppes, et à la couleur bleue, qui symbolise généralement la France à l’étranger.

Le général De Gaulle est le premier stratège de la bombe atomique de la France, se souvenant des conséquences des trois récents conflits impliquant la France (Guerre de 1870, Première et Seconde Guerre mondiale). En 1945, il crée le CEA, qui a dès le départ une finalité militaire non avouée.

Le général Pierre Marie Gallois est un des créateurs de la bombe. Il reçoit le surnom de « père » français de la bombe A. Pierre Guillaumat est chargé du projet Gerboise bleue.

De brillants scientifiques français — Frédéric Joliot-Curie, Bertrand Goldschmidt, Yves Rocard, etc. — se sont consacrés à la fabrication de la bombe. Les travaux se sont déroulés dans le plus grand secret pendant une dizaine d’années. Les militaires ne sont associés au projet qu’au dernier moment. Le CEA mit au point la première bombe sur le site CEA de Bruyères-le-Châtel (Essonne), et son détonateur au fort de Vaujours (Seine-et-Marne), tandis que le plutonium provenait de l’usine d’extraction du plutonium de Marcoule.

Félix Gaillard décide la date et le lieu de l’explosion quelques mois auparavant. Pierre Billaud est chargé de diriger la préparation de celle-ci.

Construction de la bombe

Le projet M1 de construction de la première arme nucléaire française débute en septembre 1955 au Fort de Châtillon. En 1957, la masse de matière fissile nécessaire est définie. La même année, l’accélérateur Van de Graaf du centre de Saclay permet de déterminer le matériau réflecteur de neutrons le plus approprié. L’implosoir, qui va permettre de comprimer le plutonium en une masse supercritique, est mis au point au Fort de Vaujours mais l’amorce neutronique fait alors encore défaut.

Une visite chez un fournisseur américain, fin 1958, fait changer la masse de plutonium prévue pour ne pas dépasser une certaine puissance et risquer une forte contamination radioactive du site de test. La structure de la bombe reste cependant la même. Le plutonium économisé permet la réalisation d’une autre bombe plus petite et plus simple : l’engin P1 (Gerboise blanche).

Fin 1958, les plans de l’engin M1 sont établis. Il est construit en 1959 mais doit attendre la livraison de plutonium produit à Marcoule pour être finalisé. La première bombe française, de forme sphérique, comprenait moins de trente-deux lentilles explosives ou GODSC (générateur d’onde de détonation sphérique centripète) maintenus par une gaine de résine et fibres de verre et pouvant s’ouvrir pour y insérer, au centre, le cœur fissile. Ce cœur d’alliage de plutonium, nommé Jézabel, était entouré d’une couche d’uranium naturel faisant office de « tamper » et de réflecteur de neutrons pour augmenter l’efficacité de l’engin. Une source de neutrons externe, car placée à l’extérieur du cœur, permettait d’amorcer la réaction en chaîne avec précision, améliorant encore l’efficacité.

Déroulement de l’essai

Quelques journalistes, triés sur le volet, assistent à l’explosion. Ils sont installés à proximité immédiate (à seulement 20 km) de l’hypocentre (le « point zéro »). Des consignes leur demandent de s’asseoir au sol, de tourner le dos à l’hypocentre, de replier les bras devant les yeux et de porter des lunettes de protection.

Une fusée rouge est tirée une minute avant l’explosion. Le à h 4 (heure locale), la bombe atomique est mise à feu sur le site d’essai nucléaire de Reggane dans le Tanezrouft au centre du Sahara, alors territoire français rattaché à l’Algérie, au point 23° 19′ N, 0° 04′ O.

Cette bombe, perchée sur une tour métallique haute de 100 mètres, développe une puissance de 70 kilotonnes. L’explosion est trois ou quatre fois plus puissante que celle de Hiroshima. Alors que les habitations les plus proches se trouvent à seulement 70 km, la bombe Gerboise bleue entraîne la projection de retombées radioactives dans une zone de 200 km de large et de 100 km de long. Les journalistes ont certainement été très exposés aux radiations générées par l’explosion aérienne de la bombe.

L’armée française avait prévu une puissance située entre 60 et 70 kt. L’opération Gerboise bleue a donc été un succès total sur le plan scientifique et militaire.

Le plus puissant premier essai de bombe A

Avec Gerboise bleue, la France est devenue la quatrième puissance nucléaire, après les États-Unis, l’URSS et le Royaume-Uni. Ce test demeure, en 2019, le plus puissant premier essai nucléaire. Plus puissant que l’américain « Trinity » (19 kt), le soviétique « RDS-1 » (22 kt), le britannique « Hurricane » (25 kt) ou le pakistanais « Chagai-I » (40 kt).

D’une masse totale semblable à celle de la bombe Fat Man larguée sur Nagasaki, Gerboise bleue a libéré une puissance trois fois supérieure. Ce rendement largement supérieur aux premières bombes A (presque 50 % contre environ 17 % pour Trinity) s’explique par le savoir accumulé dont ont bénéficié les scientifiques français via l’observation de mesures américaines réelles et la publication de données secrètes (Atoms for Peace).

Seules deux bombes A plus puissantes ont été testées dans le Sahara : « Rubis » (< 100 kt, ), et « Saphir » (< 150 kt, ). Toutes deux cependant dans des installations souterraines percées dans le massif montagneux du Hoggar.

Conséquences

Retombées radioactives

Selon un document déclassifié le 4 avril 2013 mais rendu public dix mois plus tard le 14 février 2014, les retombées radioactives sont plus longues que prévu. Elles durent treize jours, la durée qui était prévue n’est pas communiquée.

Un jour après l’explosion, le nuage radioactif atteint Tamanrasset en Afrique subsaharienne, ainsi que Ndjamena et Bangui en Afrique centrale. Puis le nuage remonte vers l’Afrique de l’Ouest pour atteindre Bamako quatre jours après l’explosion. Deux semaines après, toujours chargé de radioactivité, il atteint les côtes méditerranéennes de l’Espagne et la Sicile.

 

 

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