23 décembre 1871 | Egypte: Aïda, l’oeuvre de prestige au Caire

C’est sur la demande du khédive Ismaïl-Pacha, vice-roi d’Égypte, que Giuseppe Verdi compose “Aïda”. Peut-être pas, comme on le voit souvent écrit, pour l’inauguration du canal de Suez, mais comme une oeuvre de prestige figurant au programme du tout nouvel Opéra du Caire, où elle est créée le 24 décembre 1871, soit deux années après l’inauguration du théâtre.
“Ce travail, écrit Nicole Wilde, dans ‘Décors et costumes du XIXe siècle’, répondait à une demande précise du vice-roi qui voulait un opéra ‘purement antique et égyptien’, avec ‘une mise en scène rigoureusement exacte et une couleur locale strictement conservée’.”
Des précisions à cette genèse du célèbre opéra sont apportées par Jean-Luc Chappaz, conservateur en chef du Musée d’art et d’histoire de Genève : “[Le librettiste Camille du Locle cherchait, depuis le peu de succès rencontré par ‘Don Carlos’], le sujet d’un nouvel opéra dont il fournirait le livret à Verdi. Un voyage en Égypte, en 1869, lui donna l’occasion de se lier à l’égyptologue Auguste Mariette, directeur des Antiquités, très proche du vice-roi. Que se dirent-ils alors ? Nul ne le saura jamais, mais il est probable que c’est à ce moment que le projet de créer un opéra égyptien dut voir le jour : Mariette se serait occupé de convaincre le khédive, du Locle de trouver un compositeur de talent, si possible Verdi. Les discussions furent longues, le salaire proposé généreux, et ce n’est qu’après la lecture d’un scénario anonyme que Verdi accepta. On sait aujourd’hui (…) que l’auteur de ce ‘programme’ n’est autre que Mariette lui-même.”
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Esquisse de décor par Édouard Despléchin |
Pourtant, c’est pour les costumes que Mariette rencontre les plus grandes difficultés : ”Je suis obligé de tâtonner, d’essayer, de faire et de défaire.” Car “marier dans une juste mesure les costumes anciens fournis par les temples et les exigences de la scène moderne constitue une tâche délicate. Un roi peut être très beau en granit avec une énorme couronne sur la tête ; mais dès qu’il s’agit de l’habiller en chair et en os et de le faire marcher, et de le faire chanter, cela devient embarrassant et il faut craindre de… faire rire.”
Mariette est toutefois satisfait du résultat : “J’ai essayé déjà quelques costumes, et je vous réponds qu’ils ont un grand cachet. On n’aura jamais vu jusqu’ici rien de pareil sur la scène, et le vice-roi sera content. Non seulement les costumes sont élégants et riches, mais ils sont exacts, et les hommes de goût les apprécieront beaucoup. Les décors sont aussi en bon train. La vue des pyramides est achevée et déjà emballée. Elle est très belle et j’en suis content. Au lever du rideau, on se croira véritablement en Égypte.”

Giuseppe Verdi
Dans sa facture musicale, “Aïda” est une oeuvre de génie. Mais, autant dans sa genèse que dans sa mise en scène, cet opéra n’aurait pas vu le jour – à tout le moins sous le ciel d’Égypte – sans l’intervention d’un autre “génie” : le “Grand Maamour”.
Sources :
http://www.mom.fr/image_carto/ServiceImage/loret/loret_0990-5952_1991_bul_5/PDF/loret_0990-5952_1991_bul_5_p4-24.pdf
http://books.openedition.org/editionsbnf/853?lang=it
http://www.opera-online.com/items/works/aida-ghislanzoni-verdi-1871#sthash.XKvmnAAo.dpuf