16 août 2012 | Afrique du Sud : Massacre de Marikana; la police tire sur les mineurs en grève tuant 34 personnes

Trente-quatre mineurs ont été tués et soixante-dix-huit blessés dans les affrontements, jeudi 16 août, entre grévistes et policiers à la mine de platine Lonmin de Marikana, en Afrique du Sud, selon un bilan officiel de la police nationale. Le syndicat des mineurs NUM a évoqué trente-six morts. Par ailleurs, deux cent cinquante-neuf personnes ont été arrêtées, “pour différents motifs, violence publique, meurtre, tentative de meurtre, rassemblement illégal, possession d’armes dangereuses”, a ajouté la chef de la police nationale, Mme Riah Phiyega.
Ces morts s’ajoutent aux dix survenues dans les violences entre syndicats survenues depuis dimanche sur ce site minier, où plusieurs centaines de grévistes réclamaient d’importantes augmentations de salaire.
Le président sud-africain, Jacob Zuma, a annoncé la création d’une commission d’enquête pour faire la lumière sur cette fusillade. “Nous devons faire éclater la vérité sur ce qui s’est passé ici, c’est pourquoi j’ai décidé d’instaurer une commission d’enquête pour découvrir les causes réelles de cet incident”, a déclaré le chef de l’Etat à Marikana, revenu précipitamment d’un sommet régional au Mozambique pour se rendre sur les lieux du drame.

En Afrique du Sud, grévistes, syndicats et forces de l’ordre s’opposent dans des affrontements violets à la mine de Marikana. CRÉDITS : LE MONDE.FR
LA POLICE INVOQUE LA LÉGITIME DÉFENSE
Pour justifier son action, la police a montré des vidéos où l’on voit les forces de l’ordre tenter de disperser les mineurs en négociant avec eux, puis en utilisant différents moyens, dont des gaz lacrymogènes, des canons à eau, des grenades incapacitantes et des balles en caoutchouc. On y voit aussi un policier supplier les mineurs de se disperser : “Nous ne sommes pas ici pour vous arrêter, notre seul problème, ce sont les armes.”
Selon la chef de la police nationale, “les policiers ont dû faire usage de la force pour se défendre contre le groupe qui les chargeait”. “La police a commencé par utiliser le minimum de force, conformément à notre politique et à la loi. (…) Ce n’est que lorsque cela n’a pas suffi à stopper les manifestants que nous avons utilisé un autre moyen. Et je pense profondément, nous pensons, que cela était justifié. Nous ne voulions la mort de personne”, a-t-elle assuré.
Selon Reuters, des policiers, lourdement armés et appuyés par des véhicules blindés, étaient en train de dresser des barrages de fils barbelés quand ils ont été débordés par quelque trois mille employés de la mine, située au nord-est de Johannesburg. Ils ont alors tiré des rafales d’arme automatique sur un groupe de mineurs qui surgissait de derrière un véhicule.
“ILS N’ONT PAS L’INTENTION DE BOUGER”
Jeudi matin, plusieurs centaines d’hommes armés de gourdins, de barres de fer et de machettes s’étaient de nouveau regroupés à l’extérieur de la mine pour réclamer des augmentations de salaire. Le porte-parole du syndicat des mineurs, Lesiba Seshoka, a déclaré à la chaîne d’information eNews que le président de l’AMCU, le petit syndicat qui avait appelé à la grève, avait tenté de persuader les mineurs de reprendre le travail, en vain. “Ils lui ont dit qu’ils étaient prêts à mourir (…) qu’ils n’avaient pas l’intention de bouger, qu’ils allaient appeler leurs enfants à les rejoindre” sur la colline où ils sont regroupés depuis lundi.
Des incidents avaient commencé vendredi dernier à la mine, lorsque des centaines de mineurs de fond ont lancé une grève sauvage. Certains, encouragés par le syndicat AMCU, réclamaient 12 500 rands par mois (1 250 euros), soit plus qu’un triplement de leur salaire. Des affrontements ont alors éclaté entre partisans de la NUM et ceux de l’AMCU, né d’une dissidence de la NUM.
Les mineurs, qui vivent dans des taudis accolés à la mine, sans eau courante, touchent environ 4 000 rands par mois (400 euros).”Nous sommes exploités, ni le gouvernement ni les syndicats ne sont venus à notre aide”, avait déclaré l’un d’eux mercredi, Thuso Masakeng, “les sociétés minières font de l’argent grâce à notre travail et on ne nous paye presque rien. Nous ne pouvons pas nous offrir une vie décente. Nous vivons comme des animaux à cause des salaires de misère”.