De la déclaration à l’action, la jeunesse africaine ne se laisse plus distraire par une poignée de FCFA.

Elles (autorités) ne sont que des instruments, des ornements de mauvais gout, l’expression de l’esprit et de l’idéologie de vassalité que la France entend à jamais perpétrer dans ce qu’elle croit, qu’elle pense lui être un droit, être sa propriété. Évidemment, aidée en cela, par quelques ouailles prêtes à vendre père et mère pour une poignée de Fcfa.

Il y a 6 ans, j’introduisais mon propos, subséquent aux agressions de la France par la main de son armée, en Côte d’ivoire, par cette formule de Stephen Bantu Biko : «Le principe de base de la Conscience noire est le rejet par l’homme noir du système de valeurs qui veut faire de lui un étranger dans son propre pays et qui détruit jusqu’à sa dignité humaine ». Agressions qui, rappelons-le, ont fait des milliers de morts dans la population civile et qui a eu pour but ultime, de déporter et de séquestrer Laurent Gbagbo à la Haye, afin d’introniser une main armée à coloration locale qui obéirait jusqu’aux plus farfelues des injonctions de la France.


Six ans après, le propos est encore d’une criante et criarde acuité hélas. Heureusement, la formule de Stephen l’est davantage, et ne se restreint plus à la simple déclaration d’intention ou de l’ordre de l’incantation; mais s’inscrit bel et bien dans l’ordre de l’action. Oui, la jeune africaine, à l’image de ce que déclaraient d’une part :
Albert Memmi “Lorsqu’un opprimé a entrevu la possibilité d’être libre et qu’il accepte d’en payer le prix, il est vain d’espérer encore la paix pour longtemps”
et que d’autre part, alors président de l’assemblée nationale de la Cote d’Ivoire, Mamadou Koulibaly : “ (… ). Mais la France doit également avoir à l’esprit qu’avec la prise de conscience du peuple de Côte d’Ivoire, et sa maturité politique de 2005, débarrassée des complexes du colonisé des années 60, aucune démarche de passage en force, même par voie diplomatique, ne peut constituer une solution durable à la complexe situation qui est le résultat de la volonté de Paris de mettre au pas la Côte d’Ivoire. La jeunesse de Côte d’Ivoire est à l’image de celle du Togo, du Bénin, du Mali, du Burkina, du Sénégal, du Gabon, du Cameroun, du Congo et de tous les pays colonisés en Afrique par la France. Les aspirations de ces jeunes sont les mêmes, et le grondement est identique d’un bout à l’autre de l’Afrique. Jouer à la sourde oreille, ou vivre dans la chimère de la certitude de pouvoir tout contrôler comme dans les années 60, est pour la France et pour nos dirigeants africains actuels, un risque considérable dont les conséquences sont aujourd’hui difficiles à mesurer. ”
Cette jeunesse a entrevu non plus seulement la possibilité d’être libre, mais bien plus. Elle entend vivre avec elle, vivre d’elle et d’en bénéficier de tous les avantages et des inconvénients qui vont avec. Et aucun obstacle ne lui est plus infranchissable.
En déportant un jeune africain, parce que détenteur d’un passeport français, du Sénégal vers la France ce, sous des motifs aussi fallacieux que ridicules les uns comme les autres, les autorités sénégalaises actuelles n’ont fait que confirmer ce que la jeunesse africaine pense d’elles, comme de bien d’autres de la zone dite francophone. Sur l’application stricto sensu de l’application de la loi sur la nationalité, si le Sénégal ne reconnait pas la double nationalité ; alors, il est justifié qu’un individu ayant une autre nationalité soit renvoyé dans son pays d’appartenance. Mais nous savons qu’en l’espèce, les enjeux sont ailleurs. Et toutes les pinailleries dont sont friands certains africains, sont toutes aussi farfelues qu’inintéressantes. Elles sont de l’ordre de la diversion…comme c’est hélas le cas, en ce qui concerne l’objet de telles mesures à l’endroit de ce jeune.
Elles (autorités) ne sont que des instruments, des ornements de mauvais gout, l’expression de l’esprit et de l’idéologie de vassalité que la France entend à jamais perpétrer dans ce qu’elle croit, qu’elle pense lui être un droit, être sa propriété. Evidemment, aidée en cela, par quelques ouailles prêtes à vendre père et mère pour une poignée de Fcfa.
L’Afrique appartient d’abord, surtout et seulement aux seuls africains, malgré les élucubrations de Victor Hugo :”Allez, Peuples ! Emparez-vous de cette terre. Prenez là ! A qui ? À Personne. Prenez cette terre à Dieu. Dieu donne la terre aux hommes, Dieu offre l’Afrique à l’Europe. Prenez-la !”, que certains, en plein 21ième siècle, se permettent de reprendre à leur compte, pour espérer venir jouer les gouverneurs dans un, parmi la cinquantaine de pays qui la constituent. Les multiples agressions dont elle est victime, la réduisant à ce gâteau que convoitent toutes les avidités, toutes les cupidités exogènes, sont à inscrire dans l’ordre d’un cycle de vie. Mais, comme toute situation, il y a un début, un déroulement, puis ensuite et surtout une fin.
La France veut continuer à demeurer un empire colonial et continuer à vanter les bienfaits qu’elle engendre dans les colonies ? Elle a bien le droit et l’envie de se voir ainsi. Un adage populaire ne dit-il pas que chacun voit midi à sa porte ? Mais continuer à nourrir l’illusion que le Fcfa lui servira encore, parmi les nombreux artifices qu’elle met en œuvre pour maintenir l’Afrique dite francophone sous sa domination, et face aux grondements de cette jeunesse africaine prête à en découdre, est une provocation dont elle regrettera. Car le soulèvement de cette jeunesse est loin d’être un épiphénomène qui mérite pour toute réponse que le mépris et la répression. Les logiciels ne sont plus lus et interprétés de la même façon. Les temps ont changé et les notions de liberté et de bonheur, ne sont plus vues par certains africains et ils sont nombreux, comme dépendantes du bon vouloir de…. Quelques capitales européennes. Tout est inscrit dans la mentalité, et celle de cette jeunesse n’a aucun complexe vis-à-vis de l’oppresseur. Elle a bien assimilé les mots de :
Thomas Sankara : “L’esclave qui n’est pas capable d’assumer sa révolte ne mérite pas que l’on s’apitoie sur son sort. Cet esclave répondra seul de son malheur s’il se fait des illusions sur la condescendance suspecte d’un maître qui prétend l’affranchir. Seule la lutte libère… “
Puis ceux de : Achille Mbémbé :“L’Afrique se sauvera par ses propres forces ou elle périra. Personne ne la sauvera à sa place, et c’est bien ainsi.” Et cela, aucune autre théorie, ne l’enlèvera de la tête de cette jeunesse. Aucune autre diversion ne le fera oublier à cette jeunesse qui a entrepris la possibilité de sa liberté et gouter à ses fruits. Elle se souviendra des paroles de James Baldwin, contenues dans « La Prochaine fois le feu ».
La France veut être maitre, elle est maitre chez elle, et les africains entendent être maitres chez eux. Ce n’est qu’à cette unique condition que la paix sera garantie. Passer son temps à savoir si le Fcfa est bon ou pas pour l’Afrique est une diversion. Car la vraie question est : La France accepterait-elle qu’un autre pays batte et contrôle sa monnaie ? La réponse est non. Pourquoi les africains des pays qui utilisent cette monnaie devraient-ils l’accepter davantage ?

Par  Jay-Jay Momene

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